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Photo du rédacteurAlexandre Barbaron

Un métier, une interview : Vélotypiste

Ce métier, peu connu il y a encore quelques mois, fait aujourd’hui la une des réseaux sociaux. Mais pour en savoir un peu plus que l’oiseau bleu de Twitter, nous avons contacté Sylvia Costy, qui a écrit en direct les sous-titres du Président Macron durant ses dernières allocutions.



Graffiti : Pouvez-vous présenter la vélotypie en quelques mots ?

Sylvia Costy : La vélotypie permet d’écrire à la vitesse de la parole grâce à un clavier intelligent, de saisie rapide orthographique.

Le vélotypiste (opérateur de vélotypie) produit une syllabe en frappant simultanément plusieurs touches, en un accord, tout comme le fait un pianiste.

Un exemple : en vélotypie, le mot « entreprise » s'écrit en deux frappes sur le clavier de vélotypie, contre dix sur un clavier AZERTY. Ainsi, les mots sont écrits à un débit rapide à l'affichage.

Un clavier de vélotypie de Voxa Direct

G : À quel public s’adressent vos services ? Y a-t-il beaucoup de demandes ?

S.C. : Oui, il y a beaucoup de demandes car il y a beaucoup de besoins (on compte 8 millions de personnes sourdes ou malentendantes en France). La demande est de plus en plus croissante depuis la visibilité de la vélotypie en mars dernier par les allocutions du Président de la République.

  • Domaines d’intervention : colloques, réunions, télévision, meetings (toutes communications en direct).

  • Clients : grands comptes, institutionnels, partis politiques, agences de communication et événementiel.

  • Utilisateurs : salariés sourds, public déficient auditif participant à des événements (conférences, meetings...)


G : Vous devez être très rapide au quotidien, sur un clavier d’ordinateur ?

S.C. : Pas forcément très rapide, mais il est vrai qu’on acquiert, grâce au clavier de vélotypie, des réflexes, des automatismes, de la dextérité.


G : Combien de vélotypistes êtes-vous en France ? Y en a-t-il de plus en plus ?

S.C. : Il y a moins d’une dizaine de vélotypistes en France seulement. Avec mon associée, Lauriane, nous avons choisi de créer notre société, Voxa Direct, afin de pouvoir former d’autres vélotypistes.


G : Selon vous, est-ce que la profession de vélotypiste est mise en danger par l’intelligence artificielle ?

S.C. : L’intelligence artificielle fait de gros progrès. Mais en ce qui concerne la transcription, le sous-titrage, elle nécessite toujours une intervention humaine pour la bonne qualité du français (pas de fautes), et cela augmente le temps de traitement.

Par exemple, en reconnaissance vocale, la transcription met 8 à 10 secondes pour s’afficher. En vélotypie, c’est environ 3 secondes. Donc, l’avantage de la vélotypie, c’est de minimiser le temps de décalage entre la parole et l’écrit.


G : Pourquoi avons-nous besoin de vélotypistes ? Les personnes sourdes ou malentendantes ne peuvent-elles pas comprendre la langue des signes… ?

S.C. : Je vous pose une question : demain, vous-même devenez sourd, que se passe-t-il si on vous parle en langue des signes ? Vous me répondez : je ne comprendrais rien. Car il faut que vous appreniez la langue des signes. En revanche, vous savez déjà lire, donc vous pourrez comprendre grâce à la vélotypie.


G : Lors des derniers discours du président de la République, c’est votre société qui a fait les sous-titres. Voyez-vous les textes du Président Emmanuel Macron avant ses allocutions ?

S.C. : Pas du tout, c’est confidentiel. Cela dit, on arrive à jeter un œil rapide sur le prompteur lorsque les techniciens le mettent sur leurs écrans 5 mn avant le début de l’allocution : cela nous permet de détecter s’il y a du vocabulaire un peu spécifique.


G : Avant l’allocution du Président du 13 mars 2020, votre métier était très peu connu. Nous imaginons que depuis, vous êtes passés de l’ombre à la lumière en quelque sorte ? Comment avez-vous perçu les réactions de l’opinion publique ?

S.C. : Il faut savoir que nous ne savions pas que les sous-titres passeraient forcément sur tous les postes ; en tant normal, il faut les activer avec une touche de la télécommande. C’est ainsi que les gens les ont remarqués.

Dans les réactions, nous nous sommes rendu compte qu'effectivement, personne ne connaissait le métier de vélotypiste, et chacun y allait de son « pronostic ». Nous avons communiqué sur les réseaux sociaux pour expliquer que c’était un métier humain, et non pas une machine.

Merci beaucoup Sylvia Costy, d’avoir répondu à nos questions !


Propos recueillis par Alexandre Barbaron et Owen Samama-Brault

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