LA RUE DEVIENT UNE TOILE IMMENSE -
LÀ OÙ LE STREET ART COMMENCE
Baladons nous un peu dans Paris :
Commençons par prendre le métro aérien de la ligne 6, entre les stations Place d’Italie et Glaciaire, afin d’observer les grandes fresques sur les immeubles. Passons ensuite au croisement de la rue Barrault et de la rue Alphand où l’un mur qui forme l’angle mérite le coup d’œil car, depuis de nombreuses années, il change régulièrement de style. En effet, des fresques y sont peintes par différents artistes comme Combo ou Victoriano (dernièrement, la magnifique fresque de Victoriano représentant des taureaux pourchassant un Picasso qui semblait vouloir les saisir sur sa toile a été recouverte de peinture grise). S’il nous reste un peu de temps, nous finirons la journée à la Butte aux Cailles car tous les graffitis qu’elle abrite valent vraiment le détour. Différents styles du street art y sont rassemblés : le pochoir, la mosaïque, la bombe, le collage… Et parfois, différents éléments de la rue sont détournés pour servir l'œuvre. Une célèbre artiste maintenant décédée est d’ailleurs passée dans ce quartier. Vous pourrez voir sur le mur d’un café, 30 rue des cinq diamants, trois des pochoirs de Miss.Tic.
Bien que parfois simplement décoratif, c’est surtout un moyen de faire parler et qui permet d’exprimer une forme engagement social comme dénoncer la guerre en Ukraine, le racisme ou encore le militantisme féministe. Mais là où certains voient l'expression artistique, d’autres voient la dégradation ; le vandalisme.
* Souvent, les textes de loi ne sont pas appliqués. La mairie préfère les repeindre ou les cacher en utilisant le budget public.
Le Street art : vandalisme ou expression artistique ?
Ce qui différencie l’art urbain des autres mouvements artistiques, c’est l'éphémérité, la mise à disposition gratuite à la vue de tous dans l’espace public… Mais c’est justement la question du support de l'œuvre qui fait débat : la loi la considère comme illégale car qualifiée de dégradation volontaire de propriété par le droit pénal. Ainsi en cas de dommages importants (si le graffiti est impossible à enlever ou si l’effacer est très compliqué), la peine peut aller jusqu'à 2 ans de prison et de 30 000 € d'amende*. Il peut y avoir des exceptions. Par exemple, si l'œuvre peut être retirée sans causer de dégradations (comme des œuvres à la craie), le juge peut alléger la peine.
« Oui mais ce n’est pas un simple gribouillage !
C’est de l’art ! »
Là, ça devient compliqué, car ce qui touche les uns peut laisser les autres complètement insensibles et n’importe quelle création (de quelle nature qu’elle soit) peut être considérée ou non comme une œuvre artistique.
La seule chose que le juge peut prendre en compte dans sa délibération lors du procès c’est uniquement le « caractère original » de l’œuvre - ce qui reste extrêmement compliqué : par exemple en 1999, Miss.Tic a été condamnée à 22 000 francs (aujourd’hui équivalent à 3 385 euros) d'amende par le tribunal pour l’une de ses œuvres ; depuis, elle a toujours demandé l'autorisation au propriétaire des murs.
C’est d’ailleurs peut-être là que se trouve la solution pour éviter tous les problèmes : obtenir l’autorisation ou répondre simplement aux demandes de la mairie ou de différents propriétaires qui peuvent payer des artistes pour décorer leurs murs.… Mais où serait la spontanéité, la liberté, l’adrénaline, bref le brin de folie là-dedans ?!