Et si on pouvait repérer les cancers très tôt, encore plus tôt qu’aujourd’hui ? Cela peut paraître utopique, mais c’est évidemment le sujet de recherche de nombreux scientifiques à travers le globe. Et certains y sont parvenus, avec l’aide de curieux animaux...
Dans l’insectarium du Laboratoire d’éthologie expérimentale et comparée (LEEC), à l’université Sorbonne à Paris, plus de 130 fourmis ont appris à reconnaître un cancer grâce à l’odorat : elles ont été entraînées par une équipe de scientifiques à détecter les composés organiques volatils (VOL) émis par les cellules cancéreuses, grâce à un système de récompense (effort, puis réconfort).
Dans la première partie du test, elles ont été placées en présence d’échantillons de cellules cancéreuses humaines, à côté d’un peu d’eau sucrée. Étant donné qu’elles reniflent leur environnement en s’aidant de leurs antennes, elles associent ainsi naturellement les deux odeurs, celle des cellules cancéreuses et celle de l’eau sucrée.
Dans la deuxième partie du test, les chercheurs leur ont présenté deux autres types d'odeurs : celle de cellules saines et celle de cellules cancéreuses, mais sans système de récompense. Leur but : voir si les fourmis étaient toujours capables de repérer l’odeur apprise. Verdict : elles passaient plus de temps autour des cellules infectées, signe que l'apprentissage avait réussi.
Cette première phase de test est donc prometteuse, mais la route est longue encore avant que ces recherches ne puissent être utilisées dans le milieu hospitalier : il faut désormais reproduire l’expérience sur un organisme entier, ce à quoi travaillent déjà les chercheurs. Plus difficile encore, les cellules cultivées en laboratoire n’ont pas forcément la même complexité d’odeur que lorsque la tumeur se développe à l’intérieur d’un organisme.
Mais si le succès était au rendez-vous, les avantages seraient multiples : sur le plan médical, cette méthode serait non invasive pour le patient, et permettrait de repérer un cancer très tôt.
De plus, la variété de fourmis sélectionnées, formica fusca, est omniprésente dans l’hémisphère nord : il suffit d’aller dans n’importe quelle forêt pour en ramasser des milliers. Enfin, leur entretien est très peu coûteux : un peu de miel et de compote, et c’est tout !
La fourmi n’est peut-être pas prêteuse, mais elle est bien précieuse pour la
science !
Louis Gonnard